Après Matane, en continuant vers l’est sur la 132, vous arrivez à Cap-Chat. Vous entrez dans la Haute-Gaspésie. L’immensité du majestueux fleuve Saint-Laurent, les vagues, les senteurs, les bateaux de pêche, le vent rafraîchissant vous font réaliser que la mer est proche.
Ce qui frappe à Cap-Chat, c’est l’immense éolienne à axe vertical de type Darrieus (du nom de son inventeur français dans les années 1920), de conception et de dimensions uniques au monde. Elle est beaucoup plus puissante et résistante que l’étaient à cette époque les éoliennes de type danoises à trois pales, plus familières de nos jours, avec un alternateur en haut du mât. C’est la plus haute éolienne à axe vertical au monde. Sa hauteur est de 110 mètres. Le poids de son alternateur, situé au sol, est de 100 tonnes et le poids de la structure, 350 tonnes.
Un projet pilote
Cette éolienne est le résultat d’un projet pilote de construction conjoint entre le Centre national de la recherche scientifique du Canada (CNRS) et l’Institut de recherche d’Hydro-Québec (IREQ). L’objectif initial de ce projet était de développer ces technologies au Canada avec des appareils mieux adaptés à nos conditions et de faire les apprentissages nécessaires à l’implantation future de parcs éoliens sur notre territoire. Le but premier n’était pas de produire de l’électricité, mais d’apprendre d’un projet pilote expérimental. La NASA avait également contribué au développement du système informatique industriel qu’on retrouve de nos jours dans plusieurs usines.
En raison de la prise de conscience par les gouvernements que le marché des éoliennes à trois pales offrait de plus en plus d’intérêt en raison du développement phénoménal de celles-ci, on a abandonné les recherches sur ce type d’appareil et le Projet Éole faillit ne jamais voir son aboutissement. Compte tenu de son importance pour Hydro, on mena tout de même à terme cinq années d’études en confiant la propriété du projet aux firmes d’ingénieur qui l’avaient construit, Shawinigan Experts-conseils et Lavalin-Tech, qui fusionnent en cours de route pour devenir Lavalin. Hydro rachète l’électricité produite, ce qui amène des fonds dans le projet et permet de mener un minimum de recherches.
De projet gouvernemental au secteur privé
Le projet subit une énorme diminution de budget et on sacrifie la solidité, puisque sa durée prévue vient de passer de 30 à 5 ans. Il est tout de même un succès et réalise son mandat. Par la suite, Hydro voulant encore bénéficier de l’énergie produite par Éole, confie la centrale à deux particuliers qui l’opéreront de façon commerciale jusqu’à son arrêt en 1993, à la suite d’un bris majeur du roulement principal. Les gouvernements fédéral et provincial abandonnent les recherches sur l’éolien. Ils transfèrent les subventions au secteur privé. Les Partenariats privé-public (PPP) avaient la cote. Certains parlèrent des PPP comme signifiant « Pourquoi-Payer-Plus ». L’esprit de cet abandon se résume à la formule : « Les profits au privé, les pertes au public ».
L’unicité d’Éole mérite d’être mieux connue au Québec. Avec le Rocher Percé, ce projet devient la marque de commerce de l’entrée en Gaspésie. De plus, la visite du Jardin de
permaculture au pied des éoliennes ajoute un intérêt. Le responsable du projet, Benjamin Robert de Massy, invite à découvrir « une oasis de durabilité et de biodiversité où la nature et la technologie se rejoignent pour créer un environnement harmonieux et durable correspondant aux valeurs de l’équipe du projet Éole ».
Le rôle de Nikola Tesla
Patrick Kenney, responsable à l’interprétation, possède un don pour expliquer le fonctionnement de l’éolienne. Vous apprendrez le rôle joué par le grand inventeur Nikola Tesla (1856-1943). Il est surtout connu pour son « rôle prépondérant dans le développement et l’adoption du courant alternatif pour le transport et la distribution de l’électricité ». Ce courant permet de transporter l’électricité sur de grandes distances. Vous comprendrez clairement la différence avec le courant continu, les watts, les ampères, les volts, etc. Tesla est le nom donné à la voiture électrique la plus avancée en ce début du XXIe siècle. Il est considéré comme « l’un des ingénieurs les plus créatifs de la fin du XIXe siècle».
Une belle visite éducative, un beau coin de pays à visiter
Faire le tour de la Gaspésie, c’est selon moi une preuve et une marque de fierté pour tout vrai Québécois. J’ajouterais faire le tour du Rocher Percé, comme je l’ai fait souvent avec mes enfants, mais cela est devenu illégal.