Jean Héon
Extrait d’un article originalement publié à l’automne 2003 dans le magazine La Maison du 21e siècle alors que des feux de forêt dévoraient les forêts de la Baie-James et enfumaient le sud du Québec.
Dans la plupart des villes du Québec, il est interdit de faire des feux, notamment de feuilles mortes, mais il en est autrement dans les petits villages de campagne. Chaque municipalité́ est responsable de la réglementation sur son territoire; la plupart autorisent les feux sous différentes conditions : permis, gratuit ou non, visite d’un inspecteur au préalable, feu à ciel ouvert, feu dans un baril ou dans un foyer muni d’un pare-étincelles et d’une cheminée avec chapeau, feu ne devant pas incommoder les voisins, feu de camp permis et feu de feuilles interdit ou carrément tout feu interdit, le tout étant assujetti aux avis de la Société́ de protection des forêts contre le feu (SOPFEU).
C’est lors des travaux de nettoyage effectués par les résidents que surviennent le plus souvent des incendies près des zones habitées, soit 21 % de tous les feux de forêt au Québec. La perte de contrôle des brûlages d’herbe, de feuilles mortes et de rebuts requiert plusieurs interventions de la part de la SOPFEU et des corps de pompiers municipaux. Cependant, bien que ce soit interdit, plusieurs citoyens brûlent les feuilles mortes et souvent ils en profitent pour brûler une foule d’objets encore plus toxiques comme le plastique, du bois traité ou même des pneus!
La combustion de feuilles mortes génère différentes particules solides et gazeuses nocives. Par exemple, des hydrocarbures dont les aldéhydes et les cétones qui irritent les yeux, le nez, la gorge et les poumons. Une bonne partie de la fumée de feuilles est constituée d’hydrocarbures polynucléaires aromatiques (HPA), reconnus comme étant cancérigènes par l’Agence américaine de protection de l’environnement (EPA).
Il ne faut pas non plus minimiser la toxicité des microorganismes (champignons) qui se trouvent dans les feuilles mortes et qui migrent dans les maisons avec la fumée. Rappelons qu’une maison isolée aux normes Novoclimat subit sept changements d’air complets à l’heure. On comprend donc qu’aucune maison n’est complètement étanche à l’air extérieur (ni à la fumée).
Comme ce genre de feu est généralement mal aéré et que les feuilles peuvent être humides, la combustion est souvent incomplète et dégage beaucoup de monoxyde de carbone. Ce gaz invisible réduit la quantité d’oxygène que les globules rouges absorbent pour alimenter les tissus du corps humain.
Solutions vertes
La façon la plus facile de se débarrasser des petites quantités de feuilles mortes est d’utiliser la tondeuse pour les déchiqueter et ainsi permettre aux nutriments qu’elles contiennent d’être absorbés plus facilement par votre pelouse. Les vers de terre et les fourmis participent à l’incorporation de la matière organique à votre terrain. Pour les plus grandes quantités, vous pouvez laisser les feuilles en tas au bout du terrain, ce qui fera un excellent habitat pour les petits mammifères et les oiseaux qui cherchent à se protéger du froid. Les feuilles mortes peuvent aussi être utilisées comme paillis dans les plates-bandes, explique Édith Smeesters, biologiste et auteure du livret Le compostage domestique produit par la [défunte] revue Fleurs, plantes et jardins.
Dans les municipalités qui n’offrent pas de service de collecte des feuilles mortes, l’alternative au brûlage des feuilles est d’en faire du compost, le meilleur engrais qui soit. La nécessité de détourner les résidus organiques et autres déchets des sites d’enfouissement est bien établie. Parmi les nombreux bienfaits du compostage, on peut mentionner : la biorestauration, notamment des forêts, marécages et autres habitats naturels, le contrôle des maladies animales et végétales, le contrôle de l’érosion et la prévention de la pollution par le compostage des sols contaminés. Il est facile de commencer un tas de compost qui constituera par la suite un excellent fertilisant tant pour la pelouse que pour les plantations, notamment au potager. Au Québec, les feuilles mortes et les résidus de jardinage constituent plus de 20 % des matières envoyées aux sites d’enfouissement : quel gaspillage!
En vertu du règlement no 1196-20 (règlement relatif à la sécurité incendie),
il est strictement interdit de brûler ou de permettre de brûler des résidus ou déchets de construction, de l’herbe et des feuilles mortes.