L’ambition d’une mère

Mettons les choses au clair dès le départ : j’ai une maman extraordinaire. Aucune de nos petites mésententes sans grande portée survenues en ces temps chaotiques de l’adolescence n’a eu raison de l’amour que nous nous portons. Puisque j’endosse à mon tour le rôle de mère, je regarde mes trois oursons et déjà, je me surprends à envisager leur avenir.

 

Ils devront être doués dans quelque chose, passionnés par un sport ou une discipline artistique ou scientifique, être polyglottes (avant l’âge de 20 ans), férus de politique et connaître l’histoire du Québec par cœur. (Pas question d’avoir des incultes dans la famille!). Les garçons devront être polis et avenants, respectueux des demoiselles. Ma fille devra avoir appris à se faire respecter. Ils devront tous avoir une grammaire écrite irréprochable. Les études? Tant qu’ils se passionnent pour un métier. Un métier bien payé? Bof, tant qu’ils sont heureux et peuvent subvenir à leurs besoins.

 

Oui, de grandes ambitions pour mes petits chéris

Et moi, à 49 ans, ai-je rempli toutes les cases pour rendre fiers mes parents? Ma maman me voyait pianiste, avocate (j’ai toujours eu l’argument facile), agente de bord ou encore grande romancière. Je ne suis évidemment rien de tout cela. Durant toute ma vie d’adulte, mes parents nous ont répété à quel point ils étaient fiers de nous, mon frère et moi. De ce que nous étions devenus comme être humain. Dernièrement, ma mère me le redisait avec tendresse. Pourtant j’ai toujours pensé que je n’avais pas exploité tout mon potentiel et que je n’étais pas là où elle aurait voulu que je sois.

 

J’ai bifurqué du chemin, expérimentant selon mes envies différents programmes d’études et autant d’emplois. Ma route m’a menée ici. Je ne suis pas à la tête d’une multinationale, je ne suis pas millionnaire. Mon train de vie est humble et simple, ma richesse, c’est ma famille. Quoi de plus banal d’énoncer ce genre de choses, alors que tous les médias sociaux nous vantent la gloire, le dépassement de soi et les défis hors norme.

 

Est-ce que ma mère serait fière de moi?

Mes réalisations d’aujourd’hui sont-elles plus sensationnelles que mes bricolages de la maternelle à ses yeux? Mélange-t-elle fierté et amour inconditionnel? Si je ratais ma vie, trouverait-elle de quoi être fière quand même? Une maman est-elle aveugle à ce point? Et si elle me mentait et qu’elle avait honte ou pitié de moi, mais que par amour, elle n’en disait mot? Et si moi, un jour, j’en faisais autant pour mes enfants? Je les regarde brillants et talentueux. Je leur prédis un bel avenir. Mes enfants me décevront-ils si la voie qu’ils choisiront n’est pas à la hauteur de leurs capacités, selon moi? Viendra probablement le jour où ce que mes enfants seront me rendra immensément plus fière que ce qu’ils feront.

 

Tu es donc fière de moi, maman?

Alors que tu nourrissais tant de grands rêves pour moi, ne t’es-tu jamais dit que j’aurais pu être tellement plus que « la propriétaire d’un café et mère de famille? » En même temps. Je suis la fière maman de Chloé, Charles et Thomas. Et cette fierté, c’est toi, maman, qui me l’a transmise. Avec beaucoup, beaucoup d’amour.

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