Jacques Grand’Maison a été invité en 2002, à prononcer une conférence à l’université McGill dans le cadre du Programme d’études sur le Québec. Son sujet, la démesure.
Né en 1931, il a toujours observé la société jérômienne et québécoise. Son imaginaire a été formé par sa mère, une femme qui avait un gros bon sens et son père, très travailleur, peu instruit, mais muni d’un raisonnement sûr. Ses études au collège classique, sa formation en théologie, ses études à Rome lui ont donné une bonne formation de base.
Dans ce livre, il se base sur ses deux derniers ouvrages : Au nom de la conscience, une volée de bois vert et Quand le jugement fout le camp. Il pousse un peu plus loin sa réflexion. Son style, déroutant pour ceux qui le connaissant peu, est basé sur le sermon. Il a écrit et prononcé des sermons hebdomadaires pendant plus de 60 années à Saint-Jérôme et à Saint-Hippolyte. En 15 minutes, il abordait un grand problème pour faire réfléchir ses ouailles. Par la suite, la 2e partie proposait des solutions en se référant à des philosophes, des sociologues, des penseurs et dans la 3e partie, il se demandait ce que le Christ aurait fait.
Il suggérait des pistes de solutions
Comme un prophète au sens ancien ou un visionnaire au sens moderne, il suggérait des pistes de solutions à nos problèmes, il obligeait les fidèles à raisonner dans un monde qui résonne. Il a identifié les archétypes qui ont façonné l’être humain depuis le début de l’humanité, indépendamment de l’ethnie, de la provenance : le privé et le public; le sacré et le profane; le transcendant : le permanent, la durée et son contraire l’immanent : le passager, la mode; il ajoute la nature humaine et le libre arbitre.
Jacques Grand’Maison s’intéressait à l’imaginaire des enfants qui se posent des questions sur le monde. Face au relativisme moral, à l’individualisme extrême, à l’hyper consommation, à la mondialisation, que faire? Pour lui, les trois composantes principales de notre société, sont le sacré, la morale et le droit. Le fondamental c’est qu’aucune ne devienne dominante puisque cela va nous entraîner dans la démesure. Il affirmait souvent qu’il avait une « espérance têtue ». Sa foi profonde lui permettait de véhiculer une vision du monde positive. La charité, pour aider ses concitoyens les plus vénérables, complétait ce trio de vertus à la base du christianisme.
Retrouver le sens de la mesure
Il ne faut pas tomber dans le nihilisme, « retrouver le sens de la mesure et reconstruire bien des choses qui se sont effondrées ». La démesure implique le rejet du riche héritage de notre passé, « des grandes traditions spirituelles ». Cela entraîne la remise constante des compteurs à zéro, l’éphémère, la mode, la création ex nihilo, la recomposition critique des patrimoines reçus. La démesure conduit au haut taux de suicide, à l’analphabétisme, à la jouissance maximale du présent. « Dans nos sociétés thérapeutiques sursaturées de modes psychologiques primaires, peu critiques de leur pauvreté en fondements. Notre civilisation a développé des démesures inédites et de divers ordres que nos prédécesseurs n’ont ni connues ni vécues. »
D’où il nous regarde, il doit bien constater que la démesure a culminé avec la pandémie, le confinement, la peur extrême, l’arrêt de presque toutes nos activités. Il avait anticipé les horreurs qui nous vivons. En le lisant, nous trouverons des solutions.