Claudette Domingue et Le Temps réinventé
Qui, habitant, à Saint-Hippolyte depuis un certain temps, n’a jamais entendu parler de Claudette Domingue? Elle fait partie de notre paysage artistique depuis quatre décennies. Elle est un pilier du développement culturel local.
Claudette Domingue a présenté son installation intitulée Livre d’artiste – Le Temps, une œuvre d’art visuel, mais aussi littéraire, dans le cadre de l’exposition Nouvel Angle qui s’est tenue en mai au Chalet Bellevue à Morin-Heights. Ce projet exploratoire combinait l’impression en gravure et le pliage de papier dans le but de donner un espace tridimensionnel à l’art imprimé. Elle regroupait les productions de 14 artistes de l’Atelier de l’Île, un centre d’art situé à Val-David.
Sa carrière
Le Sentier a suivi de près l’engagement artistique de cette créatrice de chez nous. Un comité culturel voyait le jour à Saint-Hippolyte en 1989 : elle en faisait partie. En 1991, elle donnait des cours d’initiation à l’art et permettait à ses jeunes artistes d’exposer à la galerie Entre-Nous. Ce ne fut pas la seule. Deux autres expositions ont suivi. L’année suivante, elle donnait un atelier sur l’impressionnisme. Et en 1993, elle en donnait un sur les peintres naïfs. En 1994, elle a été au cœur de la création de la Société québécoise de recherche en création artistique (SQRCA). Plusieurs expositions du groupe ont eu lieu dans les années qui ont suivi à Saint-Hippolyte et à Sainte-Adèle.
Parallèlement, elle était présente dans le paysage Montagne-Art depuis le début. En 1987, elle y exposait des aquarelles. En 1989, elle participait à un œuvre collective. En 1991, elle devenait invitée d’honneur. En 1993, elle faisait partie du groupe d’ambassadeurs de Montagne-Art reçu au Centre de créativité de Charlevoix. En 1998, elle recevait un prix d’excellence Florence Landry, catégorie Art spatial. Qui sera étonnée d’apprendre qu’elle occupait le poste de présidente de Montagne-Art en 1999? Claudette Domingue est une artiste hippolytoise qui s’est vraiment engagée dans sa communauté.
Depuis 2000, elle se consacre à la gravure. Ses estampes et ses livres d’artiste se retrouvent dans les collections de la Bibliothèque et Archives nationales du Québec, de Bibliothèque et Archives Canada, de la Banque Nationale ainsi que chez de nombreux amateurs de collections privées.
Fiche technique
Chacune des 40 pages du livre est une œuvre en soi. Dans chacune, on retrouve l’utilisation de trois techniques : le dessin, l’embossage et la gravure. Le dessin représente une portée. Chaque œuvre est pourvue d’une couleur de l’arc-en-ciel. Elle comporte aussi un embossage, en relief, qui représente des petits personnages qui marchent. Le gaufrage a été réalisé en découpe sur le plexiglas. La gravure est une collagraphie. Elle a été faite à la pointe sèche et au burin, rehaussés de gel acrylique sur trois plexiglas de 78 cm de largeur. L’impression a été réalisée en 40 étapes sur papier. Elle comporte le pliage de cinq impressions en accordéon leporello. Le livre d’artiste se manipule. On peut le moduler de différentes façons.
Claudette Domingue a dû apprivoiser l’art du pliage pour produire cette œuvre. Une expérience qui l’a enchantée. Nous lui laissons la parole afin qu’elle présente elle-même son Livre d’artiste – Le Temps.
Son concept
(J’ai adopté)… l’art du pliage afin de créer un livre « nouvel angle ». Le titre suggère d’emblée le choix de créer un livre avec le pli accordéon 2-4-8 par sa position debout, le livre accordéon additionné de cinq extensions projette une œuvre magnifique. Le livre s’ouvre sous plusieurs formes. En couleur, en escalier, en éventail comme l’instrument. En extension, il est majestueux avec ses 40 pages de gravure. Le livre obéit et peut être manipulé très ouvert. Simplement ouvert sur une table, permettez-vous de le regarder en tournant les pages. Déposé dans un boîtier de forme rectangulaire, le livre se découvre en détachant la base et en glissant le boîtier vers le haut.
Son temps
Rythme fléché du métronome
Seconde après seconde… irréversible
Il fuit pas à pas…
jusqu’à la fin du temps.
Le temps fuit pas à pas vers le futur laissant d’innombrables moments présents devenir les mémoires du passé. Le futur, cet inconnu, c’est le temps présent imaginé jusqu’à la fin des temps.
Le temps s’enfuit sur la portée au rythme fléché du métronome célébrant l’air d’une harmonie de gamme aux couleurs Newtoniennes d’un arc-en-ciel.
Irréversible – lorsque nous donnons au temps l’image d’une droite fléchée, c’est son cours que nous représentons. En barrant cette flèche droite d’une perpendiculaire pour marquer l’instant présent, nous cloisonnons le temps passé et futur.
L’art du pliage, une découverte
L’ouvrage L’art du pliage a été écrit par Hedi Kyle. Claudette et ses collègues ont eu la chance, au cours de ce projet, de recevoir une formation en ligne de cet artiste. Ce fut une découverte pour Claudette qui ne cessera jamais de s’investir dans de nouvelles formes d’art. « Toujours plus haut, toujours plus loin. »
Œuvre d’une autre artiste de l’exposition : Olga Inès Magnano. Elle y est question des sentiments d’incertitude et d’instabilité face aux forces de la nature.
Photo : Lyne Boulet
Jocelyne Annereau Cassagnol : arbre/moi
L’Hippolytoise Jocelyne Annereau Cassagnol, bien connue à Saint-Hippolyte, est, elle aussi, toujours active sur la scène culturelle. Il y a peu, l’exposition arbre/moi soulignait la Journée de la Terre. Une démarche d’art et de nature pour établir un lien entre les personnes et les arbres. Jocelyne était de l’aventure.
« Enseignante, orthopédagogue et directrice d’école, madame Cassagnol est aussi une artiste multidisciplinaire. Initiée à plusieurs disciplines comme la peinture à l’huile, l’acrylique, la sérigraphie à eau-forte et la céramique, elle a produit des œuvres importantes et a participé à plusieurs expositions. À partir de 2006 et durant plusieurs années, elle a aussi été animatrice-organisatrice et guide à la Maison de la Culture et de Montagne-Art où, avec sa complice Claudette Domingue, elle a monté plus de 50 expositions et produit autant d’affiches publicitaires.»*
arbre/moi
Comme une forêt aux arbres tous uniques, les participants à l’exposition évoquaient chacun leur vision : sentiment d’appartenance, cycles intemporels de la nature, esprit de l’arbre, etc. Jocelyne a choisi de célébrer la vitalité et l’évolution des formes des arbres. Sur le site Web arbre/moi.ca, Jocelyne explique, dans une courte vidéo, « spontanément, je compare beaucoup les arbres à nous, êtres humains. Ils sont comme nous. Ils ont une certaine unicité. Ils ont des relations entre eux et avec la nature ».
L’exposition originale, un projet d’Elizabeth Whalley, est terminée. Une autre artiste, Nadia Bertrand, a eu l’idée de la porter en d’autres lieux. Le Musée Zénon-Alary à Sainte-Adèle accueille une grande partie de ces tableaux jusqu’au 16 juin. On y retrouve deux des œuvres de Jocelyne : L’Arbre égocentrique au fusain et Mouvement, à la sanguine, au pastel et à l’acrylique. À noter que ce musée n’ouvre que la fin de semaine. On peut voir à la Galerie Apostrophe, également à Sainte-Adèle, une autre réalisation de Jocelyne, L’arbre au clair de lune, une gravure à eau-forte.
* Extrait d’un article d’Antoine-Michel LeDoux : Jocelyne Annereau Cassagnol – L’humain et l’environnement créateur dans toutes leurs dimensions, Le Sentier, février 2023.